Résumé : Cédric est l'enfant non désiré de Nadège Solignac, tueuse en série.
Au fil du temps, il découvre son passé familial et tente de grandir sous l'ombre meurtrière de sa mère.
Mais un tel monstre peut-il aimer ? Peut-on seulement lui survivre ?
Un roman psychologique noir dans lequel le lien filial oscille dangereusement entre amour et haine.Mon avis :Tout d’abord, je tiens à remercier Joël des éditions Taurnada pour sa confiance et pour m’avoir fait découvrir en avant-première ce nouveau roman à la quatrième fort inquiétante.
Ayant déjà lu et apprécié certains des précédents romans (chroniques en cliquant sur les liens suivants)
"La peine du bourreau",
"Les eaux noires",
"Digital way of life",
"Il était une fois la guerre",
"Le dernier festin des vaincus" "Contre l'espèce", j’étais curieuse et impatiente de voir ce que l’auteure allait nous réserver pour son dernier opus ^^ cependant, cette fois, j’ai eu beaucoup de mal à trouver les mots pour décrire mes ressentis. Le sujet abordé, même s’il titillait grandement mon intérêt, m’a de suite fortement interpelée par sa gravité, sa dureté et son côté révoltant. Attention, âmes sensibles s’abstenir ⚠️.
Nadège Solignac, dont nous avions fait connaissance en 2019 avec "Mon ombre assassine", est de retour dans cette suite. Spoiler, ce roman dévoile des événements passés. Même s’il peut se lire indépendamment, il est quand même conseillé si possible de lire le premier pour mieux appréhender et apprécier la personnalité de Nadège et l’évolution de son personnage.
Cette institutrice à l’apparence douce, cette femme patiente et attentive aux autres, n’est pas celle que l’ont croit. En effet, sous son air affable se cache un autre visage, une autre personnalité : celui d'une tueuse en série des plus atroces.
Pourquoi ceux qui lui sont chers meurent-ils tous dans d’étranges conditions ?
Comment se fait-il que sans être inquiétée, elle ait ainsi perdu sa mère, sa sœur en situation de handicap, son père, sa belle sœur et sa nièce ?
Même si son frère Julien s’occupe de l'empire familial, pourquoi a-t-il coupé les ponts avec elle ? Que sait-il réellement de tous ces drames inexpliqués ?
Après avoir été acquittée, la Justice n’ayant pu prouver avec certitude son implication dans ces meurtres, cette dernière tente de reprendre sa vie là où elle en était restée. Comment y parvenir quand la graine du doute reste à jamais implantée dans l'esprit collectif ?
Puis, lors d’une terrible nuit, Nadège est violée et se retrouve enceinte. Sans en informer personne au cas où elle se serait débarrassée de l’enfant à venir du jour au lendemain, elle décide contre toute attente de s'enfuir, pour accoucher, ou plutôt expulser "çà" comme elle l’appelle. Aux yeux de cette génitrice, ce frêle nouveau né sans défenses va devoir mériter sa survie, prouver sa valeur. À l’aide de méthodes peut orthodoxes, de comportements tous aussi affreux les uns que les autres, cette "mère" dépourvue d'affect et de sentiment maternel va lui faire subir les pires choses : s’il se bât il survivra, sinon il mourra. Or, "ça" résiste, donc "ça" deviendra Cédric.
Sans y être préparés, le ton est donné. Ces quelques lignes sombres et macabres posées nous percutent et nous glacent le sang. Les questions se bousculent, taraudent notre esprit en ébullition :
Que s’est-il passé ? Pourquoi cette femme devenue à présent mère ressent-t-elle encore le besoin de faire ainsi du mal ?
Certes, son enfance a été malheureuse, mais après la colère et la haine qui la rongeait de l’intérieur au point de tuer tout ce qui l’insupportait, on aurait pu penser que cette naissance aurait été le déclic d’un changement, d’un renouveau tant attendu… Alors pourquoi gâcher cette nouvelle chance qui lui est offerte ?
Que peut pousser Nadège à perpétuer l’impensable, à continuer dans un fonctionnement de mère possessive, agressive et mortifère ?
À peine les premières pages avalées, nous voici plongés, happés, entraînés au cœur d’un presque huis clos dérangeant et oppressant, où nous allons suivre les méandres troublants de l’existence de cette "maman" tueuse en série, et de sa relation exclusive, fusionnelle ; complexe et dévastatrice avec sa progéniture, ce, depuis sa naissance jusqu'à l'âge adulte.
Tandis que ce dernier, évoluant entre quatre murs aux abords d'une voie ferrée, bataille pour se construire, il prend peu à peu conscience du passé terrifiant de sa mère ainsi que de la part d'ombre qu'elle parvient à dissimuler au monde, mais que lui, par son intelligence, sent, pressant. Pourtant, elle lui répète inlassablement qu'il n'y a qu'elle qui peut l'aimer, il y a "les autres" et "eux". Mais Cédric en grandissant va peu à peu comprendre qui elle est vraiment, et savoir comment il faut œuvrer et adapter en conséquence… si elle est "Nana Rouge", "Mi'Nana" ou "Nana".
Mais cet enfant est-il si innocent qu'il en a l'air ? Ne joue-t-il pas lui aussi un rôle suite à la manipulation mentale que lui a infligé sa mère ?
À contrario, un enfant peut-il se développer convenablement suite à une éducation prodiguée par une mère monstrueuse, sadique et manipulatrice ?
Et plus largement, peut-on réellement aimer un monstre ? Peut-on seulement lui survivre ?
Et elle, n’ayant connu que le pire, est-elle capable de ressentir le moindre sentiment ?
C’est par le truchement d’une alternance de points de vues fort bien dosés que nous allons plonger au cœur de cette famille dysfonctionnelle, broyée par la violence et la nocivité d'une mère cachant des secrets destructeurs. Tour à tour, trois voix vont prendre la parole : Cédric, Nadège, et Julien le frère de celle-ci, vont nous narrer la tragédie de leurs existences cabossées, vont nous aider à mieux cerner ce tumultueux passé afin de découvrir les actes commis par la jeune femme, et enfin comprendre peu à peu qui est Nadège et pourquoi en est-elle arrivée là. Procédé judicieux et fort immersif nous permettant ainsi d’appréhender la situation dans son entièreté. Même chose pour l’emploi du "Je" qui nous projette au plus près des pensées des personnages.
Dans ce récit addictif à l’ambiance glauque, morbide et insoutenable, nous allons alors assister, choqués, glacés et saisis d’effroi au déroulé inimaginable de cette intrigue machiavélique imaginée par l’auteure.
Grâce à une écriture directe et accrocheuse, acérée et percutante, à des chapitres courts et rythmés qui renforcent le suspense, les pages vont se tourner à toute allure ; connaître les tenants et les aboutissants de cette histoire aux multiples rebondissements sera une obsession, pour aboutir, lessivés et à bout de souffle, jusqu’au dénouement final qui nous laissera sans voix.
Quant aux personnages, ils sont particulièrement bien campés, et servent le récit au mieux afin de nous faire ressentir tout un panel émotionnel : tristesse, colère, rage, révolte… surtout que nous sommes parfaitement conscients que cette fiction pourrait rejoindre une réalité possible derrière les murs et les façades empruntes de bienveillance.
Vous l’aurez compris, malgré une lecture éprouvante par le thème ô combien difficile, ce roman m’a beaucoup plu, tant pour l’histoire, que par le cran de l’auteur pour avoir abordé un tel sujet, peu traité de nos jours. En effet, cet ouvrage amène à la réflexion sur l'influence de l'éducation, de la transmission, mais aussi de celle des traumatismes vécus et les traces qu’elles peuvent engendrer et laisser dans le psychisme d’une personne.
Alors, devient-on un tueur ou cela est-il déjà inscrit en partie dans nos gênes ?
À vous de le découvrir ^^
Donc, si vous aimez les romans coup de poing, de ceux qui bouleversent, remuent les entrailles, vous laissant exsangue à la fin de l’histoire.... foncez, ce livre est fait pour vous ; vous ne serez pas déçus du voyage
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